
RAVEN 50
Nous sommes seulement 8 petits jours après Tackle the Toad (résumé juste là) et ses 50km, et me voilà de nouveau sur une ligne de départ, celle de la Raven 50. Au programme, 50 miles (82km) et un peu moins de 3000D+*. Un ratio assez peu important, mais qu’il ne faut néanmoins pas négliger avec de belles côtes à grimper et surtout à redescendre. Elle se déroule au Yukon, dans la ville de Whitehorse, 300km à l’est de l’Alaska. C’est dans cette ville que j’ai vécu durant quasiment 1 an, et expérimenté la vie de musher. Ce ne sera donc pas ma première fois sur ces chemins, spécialement car j’ai déjà participé à cette course l’année précédente. M’y revoilà donc de nouveau, avec de l’entraînement en plus et l’expérience de l’évènement, prêt à tout donner.
*Dénivelé positif (en mètre)
Pour cette année, j’ai eu la chance d’être invité par l’organisation, grâce à leur partenaire « AirNorth », la compagnie aérienne locale. C’est pour cela que je me retrouve à enchaîner 2 courses en si peu de temps. C’est une opportunité que je ne pouvais pas refuser, cela me permet de revenir dans un lieu que j’adore, revoir ma famille d’accueil ainsi que mes amis, qui participent également à la Raven 50, sur le format relais.
Durant ces 8 jours séparant ces deux événements, l’objectif est simple: récupérer un maximum. La priorité est de se reposer pour retrouver autant de fraîcheur que possible et ne pas être complètement cramé après 20km. Suite à Tackle the Toad, j’ai donc pris 2 jours de repos total, puis fait une séance de vélo afin de tester les jambes. Et à ma grande surprise, tout allait bien. Musculairement, encore un peu fatigué bien sûr mais aucune douleur. J’en ai donc profité pour faire 2×20′ à une allure plus soutenue, pour un total de 1H10 à la fin. Deux jours plus tard, et à 3 jours de la Raven, je suis parti pour une petite sortie trail de 13km et 500m de dénivelé. Encore une fois aucune douleur, mais néanmoins une fatigue musculaire encore un peu présente. Je ne m’affole absolument pas, il reste 3 jours avant le départ et c’est du repos total qui est au programme. Je suis serein.

Whitehorse

Vendredi, départ de Canmore pour Kelowna, d’où je m’envole direction Whitehorse. Le vol est magnifique, les Rocheuses d’un côté, l’océan Pacifique de l’autre et enfin le Yukon, où je peux même reconnaître les différents sommet grimpés l’année passée comme Montana Mountain, Grey Mountain ou encore Mont Lorne (photo de droite).


J’arrive à 21H30 et Didier, ami qui m’héberge très gentiment durant ce week-end, vient me récupérer directement à l’aéroport. Le lendemain matin, je vais à Fox Lake, où se trouve le chenil de chien de traîneau dans lequel j’ai passé plus de 6 mois. Je revois Martine, la musher qui m’a accueilli ainsi que la vingtaine de chiens dont je me suis occupé. Je suis tellement heureux d’être ici, dans ce lieu rempli de belles et bonnes énergies. En début d’après-midi, après un barbecue au soleil, il est déjà temps de dire au revoir pour mettre le cap sur la récupération du précieux dossard et du briefing d’avant course.

H-24
Au briefing, je revois mes amis, au moins tout autant excité que moi, eux qui vont tous courir une telle distance pour la première fois. Je me rends vite compte que nous sommes bien plus nombreux que l’année précédente (j’apprendrais plus tard que nous sommes effectivement plus du double). À 16H, différents intervenants nous font un discours avec d’abord l’organisateur de la course John Carson, puis Sergio Avila, représentant les premières nations. Un moment de recueillement est présidé par Karole O’Brien, nous rappelant que nous traverserons un territoire sacré des premières nations. Enfin, Elias Park, qui s’occupe de l’aspect sécurité, nous informe des différents risques encourus et en particulier la conduite à tenir en cas de rencontre avec un ours!! Le dossard (n°3 pour moi) enfin en main, il est temps de rentrer pour préparer, organiser et peaufiner les affaires du lendemain. Mais avant ça, je retrouve Guillaume et Anne-Gaëlle, le couple de français rencontré le week-end d’avant durant Tackle the Toad. Je leur propose d’aller dans le bar dans lequel j’ai travaillé l’été précédent, ce qui me permet de revoir également mes anciens collègues. Nous discutons un peu et il décident de faire une randonnée le lendemain aux alentours de la course, ce qui me permettra de les voir sur le parcours. De supers supporters. Enfin de retour à la maison, Didier n’est pas là et je me prépare un bon dîner à base de pâtes fraîches, courgettes, carottes, oignons accompagnés d’une salade. Le top. H-8, il est temps de dormir, ou du moins d’essayer avec le soleil qui se couche à 23H30 ici à cette période de l’année!!



Jour de course
4H, le réveil sonne. Le départ est à 6H, j’ai donc le temps de me lever, m’habiller, bien déjeuner et vérifier que rien n’est oublié. Un peu après 5H je suis au Canada Games Center, lieu du départ. J’aime arriver en avance, quitte à être le premier, pour m’imprégner petit à petit de l’ambiance et de l’excitation générale qui grandit au fur et à mesure que les coureurs arrivent. Je retrouve mes amis et je pars m’échauffer une dizaine de minutes. Une long échauffement n’est pas le plus nécessaire pour ce genre d’effort, qui devrait se situer aux alentours de 9-10H.


6H tapante, le départ est donné. Nous sommes environ 130 à nous élancer, coureurs solo et par équipe confondus. Les 12 premiers kilomètres sont assez plats, dans une forêt alternant single et piste carrossable. Je reste tranquille et à l’aise sur mes allures, entre 4’35 et 5’10/km. J’en profite pour discuter et faire connaissance avec quelques coureurs, la bonne ambiance est au rendez-vous. Je suis 2ème au premier ravitaillement, à 3’11 du 1er parti fort, et avec 9 petites secondes d’avance sur les 3ème et 4ème. Comme l’année dernière, je n’ai pas besoin de m’y arrêter et continue ma route pour aller attaquer la première grosse difficulté du parcours, une montée raide de 600D+. Je la connais bien, je la faisais régulièrement à l’entraînement l’été passé.
Toujours en gestion, j’arrive au sommet en 41′, soit un peu moins de 900m/H. J’arrive à creuser un petit écart de 2′ sur mes poursuivant, mais je suis maintenant à 6′ du 1er. Après 100D- assez techniques, une nouvelle montée de 300D+ nous emmène d’abord au Mount Sumanik puis débute près de 15km de hors sentier. Bien que de petits drapeaux plantés à même le sol nous indique la direction à suivre, il faut sans cesse rester concentrer pour chercher et trouver son chemin. Je terrain est plutôt meuble, recouvert de petits buissons et d’arbustes qui cachent alors les roches qui peuvent surprendre les appuis. Cette partie n’a rien de très technique en soit, mais peut être très dure mentalement car longue, et dure à encaisser physiquement car très exigeante, notamment pour les chevilles qui sont sans arrêt mise à contribution pour contrer les irrégularités du sol. Je qualifierai cette section de 2ème difficulté de la course pour les qualités d’adaptation et de résilience qu’elle demande.


Mise à part le 3ème ravitaillement au 28ème kilomètre (d’ailleurs acheminé et mis en place à cheval), cette partie est très sauvage, l’impression d’être complètement seul. Après avoir monté ces 600D+, il faut maintenant les redescendre. On termine enfin cette section en hors sentier pour retrouver un petit single bordé d’arbustes à hauteur d’homme. Je vous cache pas que dans ce genre de situation, je suis hyper vigilant et je ralenti même dans les virages où je n’ai pas de visibilité à plus de 2 mètres devant moi en raison des ours, présent en nombre dans la région. À la moitié de la descente, on récupère ensuite une piste plus large, permettant de mettre un peu plus de vitesse. Je me fais cependant reprendre et même doubler à 3km du 4ème ravitaillement, marquant aussi la mi-course et le passage de relais pour ceux qui courent en équipe. Après une traversée de rivière à guet, très appréciable et appréciée, j’arrive alors à ce ravitaillement avec une petite minute de retard sur le 2ème.
À ce moment-là, je vois Manon et Nicolas, qui attendent Florian et Corentin pour partir à leur tour. Ils m’aident alors dans mon ravitaillement afin de me faire gagner du temps. J’avais fait envoyer un drop bag à cet endroit avec mes barres et mes chaussures de route. Bien que vous sommes toujours sur des chemins pour la suite, mon choix de changer de chaussures est motivé par mon envie d’accélérer sur cette 2ème moitié, notamment sur les 12 derniers kilomètres si j’en ai encore l’énergie, qui sont assez plat. Je les change donc pendant que Manon et Nicolas remplissent mes flasques et rangent mes affaires dans mon sac. Je dois dire que cette assistance improvisée fût précieuse, car j’avais prévu un arrêt de 6min, et je n’y resterais finalement que 3. Cela me donne même l’opportunité de repartir juste avant le 2ème et de lui mettre une petite pression s’il ne veut pas prendre de retard sur moi. On repart finalement ensemble sur cette seconde partie de course.

Cette portion est la plus longue entre 2 ravitaillements avec 15km. Nous commençons par 3km de plat avant de traverser une rivière de nouveau, qui fait encore une fois beaucoup de bien. Elle est ensuite grossièrement composée de 3 montées de 100D+, alternées avec des portions plus plates. La végétation est toujours à hauteur d’homme, laissant le soleil nous taper directement dessus. La gestion de l’eau et de la chaleur est alors extrêmement importante dans cette partie.
Me concernant, j’ai une baisse d’énergie dans la 1ère bosse et je me fais de nouveau distancer. Je ne m’affole pas, je le laisse partir sans essayer de le suivre. Je reste concentrer sur mon effort et mes sensations, quitte à ralentir le rythme. Je prends le temps de manger et de boire tout en me disant que ce coup de moins bien va passer, que l’énergie va revenir, il suffit juste de laisser passer l’orage pour le moment. Je reste hyper positif. Je suis toujours capable de voir le 2ème devant moi et je pense être à environ 3min derrière. Comme je le pressentais, après une vingtaine de minutes mon énergie revient, et je suis capable de remettre du rythme en montée, habituellement mon point fort. Dans la dernière bosse de 200D+, je reprends finalement du temps sur le 2ème qui ne se situe plus qu’à une trentaine de secondes devant moi. Je croise également au sommet, sur le bord du sentier, Guillaume et Anne-Gaëlle venu m’encourager. Un réel plaisir.

On bascule ensuite dans une descente de 300D- qui nous mènera vers le 5ème ravitaillement. Je me sens de nouveau bien, et je m’offre même le privilège de doubler le 2ème, lui qui m’avait doublé dans la descente précédente quelques heures plus tôt. C’est tout de même une petite victoire personnelle à ce moment-là, qui fait aussi du bien au moral. J’arrive au ravitaillement avec 45sec d’avance, après quasiment 6H de course. Je prends bien le temps de me rafraîchir et de manger du frais comme de la pastèque, qui fait un bien fou à ce moment-là. Je repart du ravitaillement environ 20sec avant mon poursuivant.
Cette prochaine section est assez courte, à peine 6 petits kilomètres. On commence par longer l’extrémité nord de Fish Lake sur 2km où bon nombres de personnes/vacanciers viennent pour profiter du lac. Beaucoup d’encouragements à cet endroit là, ça fait plaisir. J’arrive à accroître mon avance et j’ai environ 200m sur le 3ème au moment d’attaquer la dernière montée significative de la course, de 300D+. Je m’enfile un gel Gu à ce moment-là, et miracle, c’est « La Bascule ». Une énergie d’enfer sur cette montée et la descente qui mène au ravitaillement n°6. Exactement au même endroit que l’année précédente, où je me sentais vraiment très bien à cet endroit là. J’essaye de ne pas m’enflammer pour autant, de lisser mon effort autant que possible pour ne pas y laisser toute mon énergie dans ce moment d’euphorie. Arrivé au ravitaillement, j’aurais alors quasiment 8min d’avance, et le meilleur temps de course sur cette section.


Depuis plusieurs kilomètres, je cours plus ou moins avec un autre concurrent, mais qui lui participe au relais. Je n’y fais donc pas vraiment attention, mais je dois admettre que c’est quelquefois plus agréable d’être accompagné. En repartant, nous effectuons une boucle de 4km qui nous fait presque revenir au ravitaillements précédent, mais dont nous n’avons plus accès à ce moment-là. J’ai un second petit coup de moins bien durant cette boucle, mais qui s’en ira assez vite avec une descente de 500D-. Pas grand-chose à dire à ce niveau là. Bien que ce soit la dernière descente, il faut tout de même garder à l’esprit qu’il reste ensuite 12km de plat jusqu’à l’arrivée.
En arrivant au bout de cette descente, on arrive sur une large route non goudronnée qu’il faut suivre sur plus de 2km. Une nouvelle fois le soleil tape très fort, et on subit sa chaleur non seulement sur la tête mais également via la réverbération du sol. Il fait donc extrêmement chaud à cet endroit. Je savais à quoi m’attendre, et j’essaye de remettre de la vitesse afin de passer le moins de temps possible sur cette route. Je fais une moyenne 5’15/km, pas tant mal après 70km et 7H50′ de course. Au ravitaillement suivant, qui est aussi le dernier, je prends encore une fois le temps de bien boire et me rafraîchir. Il reste un peu plus de 10km dans la forêt, plutôt plat mais très irrégulier donc difficile de vraiment maintenir une allure constante. On m’annonce le premier à une vingtaine de minute devant, ce qui est trop pour aller le chercher. En revanche, je n’ai aucune idée de où se situe le troisième et je suis toujours dans mes temps de passage pour terminer en dessous des 9H. Deux motivations pour continuer à pousser et conserver cette 2ème position.

Je repars donc de là avec l’envie de finir fort, un des objectifs que je m’étais fixé. Les kilomètres s’enchaînent sur des allures comprises entre 5’10 et 6’/km, pour une moyenne à 5’32/km là où l’année dernière j’étais à près de 9’/km. Aux vues des chiffres, la progression est folle. Je regarde ma montre et mon chrono se rapproche de plus en plus des 9H de course, mais je continue à m’accrocher, sachant que l’arrivée n’est plus très loin.
Et finalement, après une ultime petite côte, c’est la délivrance… j’en termine en 8H56’32 »!! Je suis super heureux, tous mes objectifs sont atteints, avec une belle 2ème place en prime. Mes amis Guillaume et Anne-Gaëlle, ainsi que Florian et Corentin qui ont couru le premier relais sont présents, l’ambiance est top!!
Résultats
Le 3ème, Braeden Cober, avec qui j’aurais bataillé durant la mi-course avant de craquer dans la 2nde partie, arrivera finalement en 9H24’58’. Le 1er, Alex Nemethy, est arrivé 22min avant moi en 8H34’07 après avoir mené la course du premier au dernier kilomètre. Un grand bravo à lui.
Chez les femmes, on assiste à une grosse bataille jusqu’à l’arrivée puisque les 3 premières se tiennent en moins de 6min. Kate Butcher l’emporte en 10H47’48 », devant Tara Bassili 10H51’46 et Tiffany Gibson complète le podium en 10H53’37, moins de 2min plus tard. C’est dingue!!
Bravo aussi, bien sûr, à mes amis présents sur le relais et qui seront tous allé au bout de leur effort.


Ressenti
D’abord sur cette course, comme je l’ai dis, tous mes objectifs ont été atteint:
– Objectif de temps avec moins de 9H10′
– Objectif de courir pour moi, rester concentré sur ma course et gérer les coups durs
– Objectif de rapidité sur les ravitaillements
– Objectif de gérer au mieux la chaleur
– Objectif de ne pas se blesser, se faire plaisir et profiter des copains
De manière global je suis donc fier de cette course, de cette deuxième place que je suis allé chercher grâce à une course pleine, que je peux désormais conserver comme une course de référence.
Deuxièmement, sur l’enchaînement avec Tackle The Toad couru seulement 8 jours plus tôt. Je pense avoir su trouver le bon dosage entre récupération et entraînement durant cette période en appliquant les bonnes méthodes. Notamment en terme de récupération grâce à beaucoup de repos et des étirements quotidiens. Cela me prouve de quoi je suis capable, qu’il est possible d’être performant sur 2 objectifs même rapprochés dans le temps, à condition de savoir s’écouter et de s’adapter si besoin. Cet enchaînement vient conclure un bloc de 3 semaines de gros volume, à 2 mois de l’UTMB et confirmer la bonne forme du moment!!
Remerciements
Je tiens à remercier une nouvelle fois John Carson pour l’invitation qui m’a été attribué et Air North d’avoir rendu cela possible. Remerciements également à tout les membres de l’organisation pour ce bel événement nous faisant découvrir à la fois cette belle région et la culture des premières nations, ainsi qu’à tous les bénévoles présents avant, pendant et après l’événement.
Merci à Didier Moggia pour l’hébergement (on se revoit très vite).
Enfin, merci à tout le monde présent sur les bords du chemin, amis et inconnus pour les encouragements, cela signifie vraiment quelque chose!!
Photo:
– Michael McCann
« C’est plus facile et rapide de descendre une montagne que de la monter, mais la vue est beaucoup mieux au sommet «
FIN
On aiiiiime ! Grand fou !
Mercii beaucoup!!